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Podcast - Jeux Olympiques SIDNEY 2000

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C’est la deuxième fois que les Jeux se rendent en Australie après l’édition 1956 de Melbourne. Et ça a été chaud au moment de l’attribution. En effet, la ville à l’opéra le plus célèbre du Monde l’emporta avec seulement 2 voix d’avance face à Pékin qui devra patienter jusqu’à 2008 pour accueillir les Jeux. 10600 athlètes dont 4000 femmes représentent les 199 nations participant à ces derniers Jeux Olympiques du millénaire qui s’ouvrirent par une cérémonie d’ouverture riche en symboles.

Une cérémonie d'ouverture hautement symbolique

C’est au début du Printemps austral, en septembre qu’est donné le coup d’envoi de ces Jeux Olympiques. Dans un Sydney Olympic Park flambant neuf, et devant 110000 spectateurs charmés par la cérémonie d’ouverture, tous les athlètes défilent comme de coutume en attente de l’allumage de la flamme olympique. On voit un premier signe d’unité lorsque les deux Corées défilent ensemble, avec les mêmes uniformes et sous le même drapeau.

Toujours tenue secrète, l’identité de la dernière relayeuse fut un symbole fort puisque c’est la coureuse de 400m Cathy Freeman, qui avait échoué 4 ans plus tôt à la seconde place face à Marie José Pérec qui eut cet honneur. Pourquoi ce choix est-il symbolique ? Parce que Cathy Freeman est une athlète aborigène, et que leur situation en Australie a souvent été plus proche du calvaire que du rêve.

Dévastés par la colonisation britannique de la fin du 18ème siècle et les actes ignobles qui allaient avec, les aborigènes ont longtemps lutté pour conserver leurs terres, leurs droits face à l’arrivée massive des colons. Peu à peu, ces derniers se sont appropriés leur terre et ont tenté de réduire à néant leur culture, considérée aujourd’hui encore comme la plus vieille survivante de l’histoire de l’humanité. Ce n’est qu’au cours du XXème siècle qu’ils ont enfin pu être reconnus comme citoyen australien grâce au référendum plébiscité à 90% par la population qui permit aux aborigènes de se détacher du statut répugnant qui était le leur depuis l’arrivée des Britanniques, à savoir « élément de la faune et de la flore australienne ».

Ce n’est que plus tard que les peuples aborigènes ont progressivement pu revenir sur les terres de leurs ancêtres desquelles ils avaient été chassés des siècles durant. Sachant cela, on comprend mieux la puissance des acclamations reçues par Cathy Freeman, véritable star en Australie au moment où elle apparut dans sa combinaison immaculée, portant fièrement la torche olympique.

Cathy Freeman, pour l'éternité

Mais allumer la flamme n’était pas la seule mission de Cathy Freeman. Attendue plus que jamais sur le 400m, son épreuve fétiche, elle était prête à se livrer à un duel face à sa rivale de toujours Marie-José Pérec pour rendre sa revanche. Malheureusement, de revanche il n’y eut point. Depuis ses brillantes victoires à Atlanta que je vous présentées dans mon dernier épisode, Pérec a connu des blessures, des maladies, l’ayant empêché de concourir durant quasiment 3 ans. Elle décide de changer d’entraîneur quelques mois avant les Jeux mais arrive à Sidney en proie au doute. Doute plus que renforcé par la pression qu’elle va subir de la part des journalistes australiennes. Subissant selon ses dires des menaces avant son duel attendu face à la star locale, elle décidera de quitter Sidney sans prendre le départ de sa série.

 

Cela n’enleva pas tant de pression à Freeman qui, privé de sa rivale n’a plus aucune excuse pour ne pas remporter le titre qu’il lui tend les bras. Double championne du monde en titre, personne ne semble en mesure de la priver de son rêve. Le 25 septembre 2000 lors de la présentation des finalistes du 400m, tout le monde a les yeux rivés sur elle et l’ovation qu’elle reçoit à l’annonce de son nom a dû inévitablement lui rajouter encore une pression sur les épaules. Les 8 finalistes se placent dans leurs starting blocks et le départ est donné. Partie vite, elle voit pourtant la Jamaïcaine Lorraine Graham la déborder dans le dernier virage. A 100m de la ligne, rien n’est fait et elles sont encore 2 à pouvoir priver la star australienne de son apothéose.

Autrice d’une dernière ligne droite décapante, elle parvint à s’imposer largement face à ses rivales. Sa réaction une fois la ligne franchie dit tout de l’état de tension dans lequel elle se trouvait et du poids qu’elle portait depuis des semaines, des mois, voire même des années. Obligée de s’accroupir pour réaliser ce qui lui arrive alors, le visage figé, au bord des larmes et le regard fuyant, elle finira par laisser exploser sa joie, consciente du caractère historique de sa victoire, profondément olympique.

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Jane Saville, star malgré elle.

Trois jours plus tard, c’est une autre Australienne, athlète elle aussi qui marquera les esprits. Et pourtant, son nom ne vous dit probablement rien. C’est à la fois la beauté et la cruauté du sport, soulignées par l’importance mondiale des Jeux Olympiques, qui glorifie les vainqueurs et a tendance à oublier les autre.

Jane Saville, spécialiste de la marche athlétique, cette discipline étonnante qui ressemble de loin à une course où les athlètes semblent se dandiner pour essayer d’avancer le plus vite possible, est née à Sidney. Pour la première fois de l’histoire, sa distance de prédilection, le 20km marche est au programme des JO.

Cette discipline assez peu renommée est très technique. En effet, où se trouve la limite entre une marche rapide et une course ? Deux critères principaux sont retenus pour cela : les athlètes doivent constamment garder un pied au contact sol et doivent également avoir la jambe tendue au moment où leur pied touche le sol. Pour veiller à ce que ces règles soient respectées, des juges-arbitres sont répartis sur tout le parcours. Lorsqu’une irrégularité est repérée, ils attribuent un carton jaune aux athlètes qui, au bout de trois cartons reçus, sont disqualifiés de la course.

Avant la course de Jeux, Jane Saville est une athlète assez méconnue, voire inconnue du grand public. Sa discipline reste confidentielle et ses résultats sont loin de faire d’elle une star dans son pays. Seulement 26ème lors des Jeux Olympiques d’Atlanta 4 ans plus tôt sur 10km, elle remporte cependant les jeux du Commonwealth en 1998 sur 20km mais reste assez loin de pouvoir décrocher l’or sur une compétition mondiale comme en témoigne sa 7ème place aux Championnats du Monde 1999.

Au départ de la course donc, le nom de Jane Saville ne revient pas parmi les favorites au titre ou même au podium mais le public australien n’a d’yeux que pour elle et espère la voir franchir la ligne d’arrivée en tête.

Cette année-là, le départ s’effectue sur la piste du stade Olympique, puis les athlètes effectuent un circuit dans la ville avant de revenir pour les 100 derniers mètres dans le stade.

Comme lors de toutes les épreuves de marche, certaines athlètes reçoivent des cartons jaunes, d’autres sont disqualifiées, ce qui rend l’épilogue particulièrement indécis. Dans les premiers kilomètres, Jane Saville reçoit deux avertissements qui, elle le sait, lui laissent une épée de Damoclès au-dessus de la tête jusqu’à la fin de la course.

Malgré cela, elle réussit à suivre le rythme des meilleures et parvient même à les dépasser à quelques kilomètres de l’arrivée. Portée par SON public, dans SA ville dans laquelle elle s’entraîne depuis qu’elle est toute petite, elle voit son heure de gloire arriver. Dans ses rêves les plus fous, elle n’aurait sans doute jamais imaginé vivre cette émotion de revenir en tête dans un stade où plus de 100000 personnes l’attendent pour l’acclamer et lui donner la reconnaissance qu’elle mérite après plus de 15 ans de travail acharné loin des projecteurs.

A 300m de l’arrivée, après quasiment 2h de souffrance, elle commence à entendre la clameur de ses supporters massés dans le stade, elle va voir tous ses espoirs brisés en une seconde. Juste avant de passer sous les tribunes pour faire son entrée sur la piste du stade Olympique, un juge-arbitre s’approche d’elle et brandit, comme un coup de poignard, un carton rouge, synonyme de disqualification immédiate.

Encore prise dans les mouvements de sa marche, l’Australienne commence à pleurer. Elle a compris. Tout de suite. Son rêve vient de se briser et elle ne peut plus rien y changer. Elle ne rentrera pas en première sur le stade Olympique de sa ville, elle ne sera pas acclamée par ses supporters, elle ne sera pas Championne Olympique et n’entendra pas l’hymne de son pays sur la plus haute marche du podium. Elle ne finira même pas la course.

Inconsolable, elle restera en pleurs par terre, à l’entrée du stade durant de longues minutes. Lorsqu’un journaliste lui demandera ensuite ce qui pourrait la consoler, elle répondra : un flingue pour me tuer.

Passée tout près de la plus grande émotion et de la plus grande victoire de sa vie, Jane Saville a vu s’écrouler tous ses espoirs en une fraction de seconde. Bien qu’effondrée et meurtrie par cet épilogue, sa carrière ne s’arrête pas là. Grâce à un mental hors du commun, elle parviendra à repartir de l’avant pour décrocher, quatre and plus tard à Athènes, la médaille de Bronze de l’épreuve. Devenue une icône des Jeux Olympiques, plus pour sa disqualification que sa médaille, Jane Saville a démontré à quel point les sportifs de haut niveau peuvent se relever des pires échecs et toujours croire à leur destin.

Deux femmes ont particulièrement marqué cette dernière édition Olympique du millénaire en connaissant des émotions pourtant diamétralement opposées. J’aurais pu vous parler aussi du deuxième titre Olympique du porte drapeau français David Douillet, des performances des nageurs Pieter van den Hoogenband qui se fractura la main à la fin d’une course pour toucher le muret avant son adversaire ou de celle d’Eric Moussambani, le nageur équatoguinéen le plus célèbre du monde après avoir nagé seul un 100m en 1 minute 52 seconde soit plus du double des meilleurs, mais aucune de ces histoires ne m’a plus ému que celles de Freeman et Saville.

108 ans après les Premiers Jeux Modernes, ils retourneront à Athènes 4 ans plus tard pour une édition encore une fois riche en émotions. Je vous la présenterai dans mon prochain épisode, à la semaine prochaine !

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